La Nouvelle-Calédonie, la”grande terre”, est composée d’un ensemble d’îles, et de plus petites habitées dont l’île des Pins au sud, Belep au nord, et les îles Loyauté, Maré, Lifou, Ouvéa et Tiga à l’est.
“Découvrez le peuple Kanak et leurs bambous qu’ils utilisent comme support artistique !”
L’origine du peuple Kanak :
Tout comme les populations de cette région, la population indigène , les kanaks occupent ces îles depuis 3500 ans. Ils sont issus des grandes migrations austronésiennes venue d’Asie du sud-est. (voir les articles précédents)
Ils développent des techniques de cultures très ingénieuses avec une irrigation qui ressemble aux rizières en terrasse.
Ils s’organisent en petites communautés, pas plus grandes que des hameaux, composées d’habitations familiales et d’une grande case appelée “La maison des hommes”. Elle est à la disposition du chef telle le reflet de la puissance de son lignage et de sa fonction.
On note une grande diversité dans les langues, environ 36 sont répertoriées.
Il existe aussi de grandes différences dans les structures sociales, que ce soit dans l’organisation politique, les rites ou les cérémonies, tant au niveau local que régional.
La diversité artistique en est une des preuves les plus éblouissante, comme le montre l’engouement des explorateurs au XIXe siècle pour les bambous gravés de Nouvelles-Calédonie.
Le bambou… au quotidien :
Le bambou a une fonction centrale et entre dans la fabrication de nombreux objets, qu’ils soient du quotidien, rituels ou d’armement. Il est aussi utilisé pour la cuisine, pour contenir de l”eau, la construction d’abri ou d’embarcation.
chapeau de grade féminin du Vanuatu
Les feuilles peuvent être tressées pour faire des paniers, des nattes ou des pièges pour la chasse ou les parures.
Technique de la gravure sur bambou :
On peut remarquer une extrême finesse dans les traits, ce qui ne doit pas être évident à obtenir et doit demander au graveur une grande dextérité, au vu de l’aspect glissant du support et des fibres très marquées.
Pourtant, pour les bambous les plus anciens, les gravures étaient réalisées avec des outils rudimentaires, mais adaptés à ce type de contrainte, soit fabriqués avec des morceaux de quartz ou encore de pinces de crabe.
Par la suite les graveurs utiliseront du métal ou de simples canifs.
Sur certains bambous, la technique de pyrogravure est prouvée.
Le graveur enduit le dessin gravé d’une graisse terre de sienne, très sombre, ou de suie qui, une fois essuyée s’incruste dans le motif (technique utilisée pour certain tatouage traditionnel dans d’autres régions).
Le bambou support artistique :
Le bambou est alors finement orné de dessins discrets, sur des poignées de sagaies de fêtes ou de splendides peignes.
Les bambous sont aussi utilisés comme instrument de musique, coupés à mi hauteur d’homme et frappés au sol, ils accompagnent de leur son lourd les pas des danseurs.
Les flutes nasales ou traversières sont aussi fabriquées avec ce dernier, mais rarement décorées. Elles peuvent être droites ou courbées. Celles-ci sont composées de plusieurs morceaux collés avec de la résine.
Grand chef Mindia Néja portant une flûte à la main gauche
le bambou comme support de la langue :
Les bambous sont alors taillés à hauteur d’homme et sont gravés de dessins stylisés.
Il s’agit d’une tradition pour transmettre certains hauts faits, scènes de naufrages, de guerres ou de réunions importantes. Il est assez rare de retrouver ces vieux bambous.
Aujourd’hui, les plus récents sont ornés de sabres, de fusils,ou de chevaux, ils n’ont plus la même valeur et sont réalisés avec moins de soin.
Les bambous gravés à motifs géométriques semblent venir d’une tradition plus ancienne et plus répandue dans toute l’Océanie… Contenant à chaux en Papouasie Nouvelle-Guinée et îles Salomon.
Les motifs inspirés de végétaux ou d’animaux stylisés apparaissent sur des flutes et modèles de tatoueurs pour les îles Marquises. Dans quelques rares exemples, aux îles Fidji et aux îles du Détroit de Torres, il y aurait eu une histoire commune avec celle des bambous gravés de Nouvelle-Calédonie.
Certains bambous gravés à tête sculptée sont répertoriés, difficilement identifiables, il s’agit d’animaux peut être des chiens…. Animaux connus dans ces îles qu’après le passage des européens. Ils sont associés à d’autres scènes de la vie des européens.
Les bambous restent néanmoins un mode d’expression très utile à la mémorisation et à la transmission d’évènements qui sont importants pour les kanaks.
Cela ne détériorent pas une tradition mais la relance et la perpétuent.
Le bambou comme contenant à herbes magiques :
C’est une légende orale “Les deux sœurs de Moaxa”, révélée par Maurice Leenhardt, qui lève le voile sur la fonction de ces bambous gravés.
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- “le bambou figure deux fois dans cette légende, comme œuvre d’art qu’il est avantageux de porter avec soi dans son voyage(…) et comme étui pour renfermer des herbes magiques(…) Et les cheveux des deux jeunes filles, là-bas, à cause de la cendre apposée étaient blonds et clairs. Le vent les caressaient en douces ondulations. Les deux visages resplendissaient de beauté.(…)Un grand père et son petit fils se préparent à leur rendre visite.(…) Au bain, ils se coiffent et dispose leur turban.(…) Sur leur jambe ils fixent une coquille avec du poil de roussette. Et, prenant chacun un bambou gravé, ils se mettent en route, superbes, le corps frais, et l’élégance rehaussée encore par le bracelet blanc.”
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Certains contiennent encore des herbes et ont bien servi de contenant.
Sans doute, peut on y voir une relation entre le récit gravé et la puissance des herbes qui y sont conservées, comme le montre une autre légende, le mythe de Torilic.
Aujourd’hui ?
La collecte de tous les bambous gravés répertoriés, se situe entre 1860 et 1920. La production disparait au début du XXème siècle, comme l’arrêt de la production des sculptures monumentales.
Les causes sont sans doute (une fois de plus!!) dues aux circonstances qui ont conduit à la destruction des “grandes cases” lors d’opérations militaires.
La complète déstructuration de la société Kanak par les missionnaires, et les ravages de la colonisation détruisant toutes expressions artistiques, la vida de son sens et de sa fonction spirituelle, sociale et éducative.
Ces sujets et les évènements graves ou les révoltes Kanak, pourtant, auraient pu servir à graver nombres de bambous, mais cela reste rarement évoqués.
D’où ça vient? Sans doute dû à une pudeur ou à une censure issue de l’oppression du colonisateur, bien plus puissant!!!
Sources :
Wikipédia,
Le bambou gravé kanak par Roger BOULAY édition Parenthèses/A.D.C.K
BIEN !!!